ARTUR BETERBIEV

ARTUR BETERBIEV À MONTRÉAL

Vincent Morin

Les amateurs verront à l’œuvre une recrue en sous-carte de l’historique combat entre Jean Pascal et Lucian Bute, le 25 mai au Centre Bell.

Artur Beterbiev ne parle ni anglais ni français. Mais le langage universel des poings, il connaît. Il fallait le voir frapper dans les mains de l’entraîneur Marc Ramsay. Ce dernier en a même perdu ses coussins protecteurs.

«C’est un animal. Il a les mains tellement lourdes! Je ne prends plus de boxeurs, sauf si c’est un athlète de niveau olympique, comme Artur, a souligné Ramsay. Je suis très enthousiaste. On en fera un petit Mike Tyson.»

«Il devra s’adapter à la boxe professionnelle, mais on ne niaisera pas, a-t-il ajouté. Il fera peut-être deux combats de quatre rounds, ensuite deux de six rounds puis il sera prêt pour du sérieux. Sa présence ici est aussi bonne au gymnase pour des gars comme Jean Pascal et Eleider Alvarez.»

La famille loin derrière

Champion du monde de boxe olympique en 2009 à Milan sous les couleurs de la Russie, Beterbiev a également participé aux Jeux olympiques de Pékin (2008) et de Londres (2012).

Le boxeur a laissé sa famille derrière pour réaliser son rêve, dont une petite dernière prénommée Amira, ainsi que Ahmad, âgé de presque trois ans.

«Skype est bien pratique. Je m’ennuie d’eux. J’espère que le gouvernement canadien va me permettre d’amener mes enfants, ma femme et ma mère ici», a-t-il confié par l’entremise de sa gérante et interprète, Anna Reva.

Cette dernière s’est occupée de tout, que ce soit de son visa, de son logement dans la métropole ou de son transport.

«La boxe, c’est sa vie. C’est comme s’il avait gagné à la loterie, il a enfin sa chance, a-t-elle expliqué. Je lui ai trouvé un bon professeur de français, puisqu’il veut bien s’intégrer. Il veut que le Québec l’aime.»

La guerre

L’athlète âgé de 28 ans, maintenant sous la férule du groupe Hennessy Sports, a vécu la guerre entre les séparatistes tchétchènes et les troupes russes. Après avoir vécu autant d’adversité, on peut comprendre que son arrivée dans la Belle Province soit pour lui un véritable salut.

«Je suis né au Daghestan, mais j’ai grandi en Tchétchénie. J’ai connu la pauvreté durant la guerre pour l’indépendance. J’ai vu des attaques terroristes et des attentats à la bombe quand j’étais jeune, s’est-il rappelé. Je suis heureux et reconnaissant envers les présidents que la paix soit revenue.»

«Pour ce qui est de la boxe, j’avais trois frères et j’étais le plus petit, a-t-il continué. Comme j’étais très énergique, ma famille m’a guidé vers un gymnase à l’âge de 10 ans. Depuis ce temps, j’en ai fait du chemin. J’ai arrêté de compter mes combats après mon 100e.»

Son séjour dans l’équipe de boxe olympique russe a, par ailleurs, débuté par un drôle de hasard.

«La Russie m’a permis de disputer mon premier tournoi international en 2006, lorsque j’ai coupé leur champion des 81 kg, Evgeni Makarenko, lors d’une session de "sparring", a-t-il mentionné.

«J’ai pris sa place au Championnat d’Europe et j’ai ramené l’or. Mon meilleur moment a toutefois été quand j’ai remporté le Championnat du monde en 2009. Je flottais sur un nuage!»

Futur champion du monde

Ramsay a également profité de ce premier entraînement pour raconter une anecdote assez révélatrice au sujet de l'ambition de son nouveau poulain.

«Je lui ai présenté André Kulesza, qui s’occupera de son conditionnement physique lorsque je serai en camp avec Jean Pascal. On lui a dit qu’il a entraîné six champions du monde. Il a répondu: "ça va faire sept"», a-t-il dit, impressionné.