Dure aux coups, râblée et dotée d'une puissante droite, la boxeuse birmane Nwe Ni Oo est une ambassadrice de choc pour les femmes de son pays, l'un des plus progressistes d'Asie malgré des conservatismes tenaces. (c) Afp
Naypyidaw (Birmanie) (AFP) - Dure aux coups, râblée et dotée d'une puissante droite, la boxeuse birmane Nwe Ni Oo est une ambassadrice de choc pour les femmes de son pays, l'un des plus progressistes d'Asie malgré des conservatismes tenaces.
La jeune femme de 19 ans est montée sur la plus haute marche du podium aux Jeux d'Asie du Sud-Est à Naypyidaw, la capitale de la Birmanie, victorieuse aux points de son adversaire philippine dans la catégorie des moins de 57 kilos.
"Je suis très heureuse parce que je n'avais jamais boxé contre des étrangers (...) Je suis contente aussi d'avoir boxé devant les supporters birmans", s'est-elle réjouie.
Nwe Ni Oo est la première Birmane sacrée dans cette compétition depuis la première participation des boxeuses du pays aux "South-East Asia Games" (Sea Games) en 2001.
La sélection a longtemps été handicapée par l'indigence des moyens alloués par la junte militaire au pouvoir, dissoute en 2011 après des décennies de répression et de corruption.
Incarnée par Aung San Suu Kyi, la "dame de Rangoun", nobélisée pour son long combat contre les généraux, l'ouverture produit déjà certains effets sur les moeurs, mais ces changements se heurtent à des conservatismes patriarcaux dans cette société bouddhiste.
Les organisateurs de ces Jeux auraient ainsi, selon les médias locaux, proscrit les épreuves de beach-volley et de gymnastique, de peur que les tenues des athlètes ne soit jugées trop légères.
Mais dans les sports où elles ont concouru, comme le football et le chinlon, sorte de foot-volley joué avec une balle de rotin tressé, les Birmanes ont brillé.
L'équipe de boxe s'est particulièrement distinguée en remportant une médaille d'or, une d'argent et deux de bronze, contribuant à installer le pays dans les premières places du classement général.
"Le sport peut améliorer le sort des femmes"
Aussi réservée dans la vie que combative sur le ring, Nwe Ni Oo explique qu'elle enfile les gants pour offrir de meilleurs lendemains à sa famille, originaire d'une région pauvre du sud.
"Ma famille me soutient. Mon père, surtout, veut que je devienne une grande boxeuse", dit cette aînée de six enfants, la joue tuméfiée à peine masquée par une fine couche de thanaka, une pâte végétale utilisée par les femmes birmanes comme cosmétique.
Sa victoire est d'autant plus remarquable qu'elle a commencé à boxer il y a trois ans seulement et qu'elle affiche deux kilos de moins que sa catégorie.
En matière d'égalité des sexes, la Birmanie jouit d'une réputation relativement flatteuse dans une région où les femmes restent victimes du poids des traditions et des violences sexuelles.
Mais "le sport peut encore améliorer le sort des femmes dans ce pays", affirme May Sabe Phyu, militante des droits des femmes.
"Lorsque les femmes gagnent des médailles, cela montre qu'elles sont aussi capables que les hommes", ajoute-t-elle.
Les Nations unies ont récemment appelé la Birmanie à faire davantage pour que l'égalité des sexes, inscrite dans la loi, devienne "une réalité pratique".
Au cours d'un Women's Forum récent à Rangoun, Aung San Suu Kyi a rappelé que la cohésion des familles avait essentiellement été le rôle des femmes pendant les années noires de la dictature.
Désormais, "nous voulons apporter notre véritable contribution à la société, nous voulons occuper une place déterminante", a-t-elle assuré.
Lors de sa visite en Birmanie à l'occasion de ce forum, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde a rappelé que "seulement 18% des femmes adultes y ont suivi des études secondaires ou supérieures".
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